Dessins de têtes est une série débutée en 2020 et qui est toujours en cours. Alors que mondialement, la plupart d’entre nous se retrouvait en isolement en 2020, j’ai demandé, comme possibilité de dialogue, l’oreiller et une mèche de cheveux d’ami.es et d’artistes, en échange d’un oreiller neuf. J’ai toujours été fascinée par les dessins et les déformations qui modifient les oreillers au fil du temps. L’humidité de la tête qui provoque ces taches si particulières, le compactage de certaines parties entraînées par les mouvements inconscients du sommeil. L’oreiller est un lieu de rêve et de déconnexion, un lieu d’abandon, d’exil intérieur et d’intimité.
J'ai cousu la mèche sur leurs oreillers respectifs. Cette action était pour moi une façon de rester en contact avec ma communauté. Selon un processus de dépôt et d’échange sans contact et après une courte mise en quarantaine, je développais les sacs contenant l’oreiller et la mèche. J’ai réalisé à ce moment que les cheveux dessinent eux aussi ; ils sont des couleurs, des lignes et des textures différentes. Et que les teintes et motifs d’oreillers reviennent et composent un ensemble cohérent et harmonieux. Alors que j'entrais dans l'atelier pour coudre les mèches, l'odeur remarquable du dortoir emplissait mes narines. J'avais l'impression d'accéder à l'intimité de leur sommeil, d'être au plus proche d'eux, comme je ne l'avais jamais été.
Dessins de têtes : la manipulation délicate des mèches, ces gestes méditatifs de la couture, le contact privilégié avec cet objet privé m’ont permis de garder le contact et de cohabiter avec le vivant. Un vivant odorant, maculé et profondément humain. J’ai actuellement 21 oreillers et plus sont à venir.
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